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moins vous vous moqueriez de moi, et vous savez combien j’estime votre estime. Ainsi donc j’honore votre force et votre philosophie, et je ne ferai confidence de mes foiblesses qu’à ceux qui n’ont pas plus de courage que moi. Je m’en vais hors du grand chemin, je ne vous écrirai plus si réglément : voilà encore un de mes chagrins. Quand vous ne recevrez point de mes lettres, croyez bien fermement qu’il m’aura été impossible de vous écrire ; mais pour penser à vous, ah ! je ne fais nulle autre chose : je cuis toujours, et comme vous savez, je m’amuse à éplucher la racine de ma chicorée, de sorte que mon bouillon est amer, comme ceux que nous prenions à Grignan.

Les Déclamations de Quintilien m’ont amusée[1] : il y en a de belles, et d’autres qui m’ont ennuyée. Je m’en vais dans le Socrate chrétien[2]. Je vis à Mâcon le fils de M. de Paule : je le trouvai joli ; il ressemble au Charmant[3]. Je ne sais point de nouvelles, sinon que Mme de Mazarin est avec son mari jusqu’à la première frénésie. On attendoit à Lyon cette duchesse d’York[4]. Quel plaisir que vous ne l’ayez point eue sur le corps ! Nous avons trouvé en chemin M. de Sainte-Marthe ; il m’a promis de vous

  1. Lettre 335. — 1. Mme de Sévigné les lisait sans doute ou dans la traduction de Jean Nicole, père du théologien, ou dans celle de l’avocat du Teil, publiées à Paris, la première en 1642, la seconde en 1659.
  2. 2. « Cet ouvrage célèbre, dit M. Cousin, avait paru à Paris en janvier 1652. » Voyez l’appendice du tome II de la Société française, p. 396 et suivantes ; et, au tome II, p. 75 et suivantes de Port-Royal, le jugement que M. Sainte-Beuve a porté sur le Socrate chrétien de Balzac.
  3. 3. Au marquis de Villeroi. Voyez tome II, p. 471, note 13.
  4. 4. Marie-Béatrix-Ëléonore, sœur du duc de Modène, François d’Este II, née en 1658, seconde femme le 30 septembre 1673 de Jacques II d’Angleterre, alors duc d’York ; morte le 7 mai 1718. Elle était fille d’Alphonse d’Este IV, duc de Modène (mort en 1662), et de Laure Martinozzi, nièce de Mazarin.