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C’est un homme qui mettra le bon sens et la raison partout ; c’est un homme enfin. Je m’ennuie de voir que vous ne recevez encore que mes lettres des chemins : eh, bon Dieu ! ne parlerez-vous jamais notre langue ? et qu’il y a loin, mon enfant, du coin de mon feu au coin du vôtre ! et que j’étois heureuse quand j’y étois ! J’ai bien senti cette joie, je ne me reproche rien ; j’ai bien tâché à retenir tous les moments, et ne les ai laissés passer qu’à l’extrémité.

La Reine a prié Quantova[1] qu’on lui fit revenir auprès d’elle une Espagnole[2] qui n’étoit pas partie. La chose a été faite : la Reine est ravie, et dit qu’elle n’oubliera jamais cette obligation. J’ai été étonnée que Mme de Monaco ne m’ait pas envoyé un compliment à cause de vous. On n’est pas persuadé que Mme de Louvigny[3] soit si oc-

  1. 7. Quantova, ailleurs Quanto, désigne Mme de Montespan (l’édition de 1734 porte : « Madame de M*** »). — Il n’est guère facile de deviner l’origine et le sens de ce chiffre. Serait-ce un terme de jeu : Quanto va, « de combien allez-vous ? de combien la vade ? » Mme de Montespan était grande joueuse. — Ou bien le mot signifie-t-il : « Combien de temps ira, durera cet amour, cette nouvelle maîtresse ? » L’édition de 1734, dans une autre lettre (tome II, p. 293), donne quanto va en deux mots.
  2. 8. La Reine la croyait fille de son père. Elle se nommait doña Felippe-Maria-Teresa Abarca, selon M. Walckenaer (tome V, p. 406 ; sur le renvoi des femmes espagnoles voyez même tome, p. 88 et 89). « La Reine avoit amené avec elle une petite fille qui n’avoit que quinze ou seize ans, qu’elle appeloit Philippa. Elle demeuroit avec la Molina (qui fut renvoyée) ; elle n’étoit pas belle, mais elle avoit beaucoup d’esprit et de vivacité, comme ont toutes celles de sa nation ; sa faveur crût comme elle. La Reine la maria à son porte-manteau, nommé de Visé… Depuis le départ de la Molina elle fit faire l’oille chez elle, et le chocolat. » (Mémoires de Mademoiselle, tome IV, p. 414.)
  3. 9. Voyez tome II, p. 215, note 12 ; p. 388, note 8. Voyez aussi les lettres du 18 décembre 1673, du 5 janvier 1674, et la fin de la lettre du 17 juillet 1676.