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qui ne presse pas trop ? Plùt à Dieu qu’il s’en trouvât ici présentement d’aussi bonne composition ! Ils sont devenus chagrins depuis quelque temps. Chacun sait si je ne dis pas vrai. On est au désespoir, on n’a pas un sou, on ne trouve rien à emprunter, les fermiers ne payent point, on n’ose faire de la fausse monnoie, on ne voudroit pas se donner au diable, et cependant tout le monde s’en va à l’armée avec un équipage. De vous dire comment cela se fait, il n’est pas aisé. Le miracle des cinq pains n’est pas plus incompréhensible.

Mais revenons à notre marchand (j’admire où m’a transportée la chaleur du discours) : je vous assure que je lui rendrai tout le service que je pourrai.

Vous avez dû croire que je ne faisois réponse qu’à Sainte-Marie[1], par la longueur du temps que vous avez été à recevoir celle-ci, mais ce n’est pas ma faute.

Je vous trouve fort heureux (dans votre malheur) de


    bonnes intentions, » et termine la lettre : « M. l’évêque d’Autun ayant fait le panégyrique de M*** aux Jésuites, qui avoient toute la musique de l’Opéra, on dit à Paris que les jésuites avoient donné deux comédies en un jour : l’opéra et le Tartuffe. » — Gabriel de Roquette fut évêque d’Autun de 1667 à 1702, et mourut en 1707 aumônier de la princesse de Conti. « C’est sur lui que Molière prit son Tartuffe, et personne ne s’y méprit. » (Saint-Simon, tome V, p. 347.) Il prononça et fit imprimer cette année-là même (1672) l’oraison funèbre de la vertueuse princesse de Conti ; Bussy dit à ce propos : « Monsieur d’Autun avoit une ample matière pour faire une belle oraison funèbre, et son grand talent est pour ces sortes de discours. Celle de M. de Candale étoit plus difficile. C’est la plus délicate et la plus parfaite chose que j’aie vue en ces sortes de sujets : il avoit à parler de l’homme du royaume le plus galant, et sans blesser la vérité ni la sainteté du lieu, il a fait de lui l’éloge d’un prédestiné. » (Correspondance, tome II, p. 69.) Bussy était fort lié avec l’évêque d’Autun, ce qui ne l’empêche pas d’en dire peu de bien à Mme de Sévigné (lettre du 13 mai 1689) : « Il est faux presque partout, » etc. — Voyez la lettre du 12 avril 1680.

  1. 2. Voyez la lettre du 24 janvier précédent, tome II, p. 477.