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celui de Provence. Autre victoire, autre triomphe, autre gloire pour nous, et nouveau chagrin pour nos ennemis : tout va s’aplanir insensiblement ; et si par hasard il faut que nous perdions quelque chose en Provence, nous le recouvrerons ici. Venez seulement, et nous politiquerons d’un air à faire trembler tout ce qui nous hait. Je ne sais si Madame votre mère vous a fait une belle peinture du bal de Saint-Germain ; mais je sais bien que vous ranimerez tout par votre présence. J’ai admiré ce qui s’est passé dans l’affaire de R***. Si vous aviez retenu mes leçons touchant les générosités de province, vous auriez promis votre protection et vous auriez magnifiquement manqué à votre parole, sous quelque beau prétexte. Vous oubliez les belles maximes et les plus sûres. Le Roi vous reprochera un jour cette conduite. Vous immolez toute la province à un faux éclat d’honnêteté ; il falloit dire que vous ne pouviez accorder cette grâce en conscience ; mais l’ayant accordée, que ne la révoquez-vous sous main ? que ne cherchez-vous dans les mystères de la politique une trahison honnête pour faire déposséder le greffier ? Ô belles âmes, indignes de régner en Provence !


1674

*373. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

[À Paris… janvier[1].]

C’est une belle chose que de conserver les cœurs des consuls quand on reçoit ici des chagrins, et que la divine

  1. Lettre 373 (revue sur une ancienne copie). — 1. La lettre est sans date dans le manuscrit qui nous l’a conservée. Dans le Recueil de lettres inédites (1827) où elle a paru pour la première fois, on l’a