Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 3.djvu/515

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 509 —

1675


citation de votre petit procès : cela fit que je rangeai ma saignée, pour avoir toute ma liberté. Je ne vous mandai point tout ce détail, parce que cela auroit eu l’air de faire l’empêchée, et cette discrétion vous a coûté mille peines. J’en suis désespérée, ma fille ; mais croyez que je ne vous tromperai jamais, et que suivant nos maximes de ne nous point épargner, je vous manderai toujours sincèrement comme je suis ; fiez-vous en moi. Par exemple, on veut encore que je me purge : eh bien, je le ferai dès que j’aurai du temps ; n’en soyez donc point effrayée. Un peu d’oppression m’avoit fait souhaiter plutôt la saignée ; je m’en porte fort bien, débarrassez-vous de cette inquiétude.

Au reste, ma fille, nous avons gagné notre petit procès de Ventadour[1] ; nous en avons fait les marionnettes

  1. 2. Henri de Luxembourg, duc de Piney, prince de Tingry, mort le dernier mâle de sa maison, eut deux filles. La cadette, Marie-Liesse, épousa Henri de Lévis, duc de Ventadour ; elle était morte, sans enfants et carmélite, en 1660, après une séparation volontaire d’avec son mari, qui de son côté se fit prêtre, céda ses titres à son frère (père du duc d’alors, du monstre de la lettre du 13 mars 1671), et mourut chanoine de Paris en 1680. La fille aînée et héritière d’Henri de Luxembourg, Marguerite-Charlotte, était depuis un an veuve de son second mari, Henri de Clermont-Tonnerre, dont elle avait une fille, mariée en 1661 à François-Henri de Montmorency Bouteville, devenu par cette alliance duc de Luxembourg (le maréchal). Mais de son premier mari, Léon d’Albert (frère du connétable de Luynes), Marguerite-Charlotte de Luxembourg avait eu (outre un fils imbécile, l’abbé de Luxembourg) une fille, Marie-Louise-Antoinette ; celle-ci, d’abord religieuse à l’Abbaye aux Bois, puis chanoinesse coadjutrice de Poussay, rentra dans le monde sous le nom de princesse de Tingry ; il sera fort parlé d’elle lors de l’affaire des poisons (voyez les lettres des 24, 26 et 31 janvier 1680) ; c’est elle sans doute et sa mère (morte en 1680) que Mme de Sévigné appelle les princesses de Tingry. — Il est malaisé de savoir l’objet du petit procès de Ventadour dont il est ici question. Seulement on voit qu’il y avait des liens d’alliance entre ces princesses de Tingry et les Lévis de Ventadour, cadets des Lévis de Mirepoix. Le comte de Grignan