Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 4.djvu/209

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1675tout ruiner. Je fus coucher à ma Tour ; dès huit heures du matin, ces deux bonnes princesse et duchesse étoient à mon lever. La pauvre petite personne est toute consternée : elle a toujours l’idée de la mort et des périls ; elle ne s’étoit jamais trouvée à telle fête. Monsieur de Saint-Malo[1] étoit à Vitré : c’est l’aumônier de Mme de Chaulnes. Nous parlâmes fort de vous. La petite regrette bien la tranquillité et la paresse de Sully : elle mène une vie bien opposée. Je fus ravie de revenir ici : je fais une allée nouvelle qui m’occupe[2] ; je paye mes ouvriers en blé, et ne trouve rien de solide que de s’amuser, et de se détourner de la triste méditation de nos misères.

On me mande qu’on parle fort de la paix. Je la souhaite fort. Il me semble qu’elle sera bonne à tout le monde. On souhaitoit ainsi la guerre. C’est que nous nous tournons d’un côté sur l’autre.

Monsieur le Cardinal commence à me faire souvenir du vilain Mirepoix : je lui mande qu’il ne s’inquiète point, et qu’encore que je sois obligée de donner le reste de cette année à mes affaires, je lui rendrai bon compte de Mme de Mirepoix ; que quand je l’aurai commencée, je la mènerai si vivement qu’elle n’aura pas le temps de se reconnoître.

Ces soirées dont vous êtes en peine, ma fille, hélas ! je les passe sans ennui ; j’ai quasi toujours à écrire, ou bien je lis, et insensiblement je trouve minuit : l’abbé me quitte à dix, et les heures[3] que je suis seule ne me font point mourir, non plus que les autres. Pour le jour, je suis en affaires avec le bien Bon, ou je suis avec mes chers

    mais quand je serois seule dans le pays, je ne serois pas moins sûre des ménagements qu’il a pour Sévigné, qui, etc. »

  1. Sébastien de Guémadeuc. Voyez tome II, p. 317, la fin de la note 3.
  2. Les mots « je fais une allée, etc., » ne sont pas dans le manuscrit.
  3. Dans les éditions de Perrin : « les deux heures. »