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1675quets que je devois avoir déjà reçus ; mais enfin les voilà, et vous ne vous trompez pas, si vous croyez qu’ils font présentement ma plus sensible joie. Je vous remercie de comprendre un peu, malgré votre philosophie, toutes les pensées que je puis avoir sur les distances infinies qui nous séparent : vous les sentez donc, et vous êtes frappée comme moi de cette disposition de la Providence ; mais vous l’envisagez avec plus de courage que moi ; car cette dureté m’est toujours nouvelle. Je me souviens sans cesse du passé, dont le présent et l’avenir ne me consolent point : voilà un champ bien ample pour exercer un cœur aussi tendre et aussi peu fortifié que le mien. J’ai fait mille fois réflexion à ces bonnes dames qui ont fait leur devoir de leur goût. La Troche a si bien repétri et refagoté sa fortune, qu’elle s’est établie dans cette bonne ville, y faisant le siège de son empire, et le lieu de toutes ses affaires : elle a établi son fils à la cour[1] contre vent et marée, et se fait un attachement d’être auprès de lui. Pour la Marbeuf, elle avoit un peu commencé du temps de son mari, et elle ne se contraint plus présentement : elle va louer une maison pour cent ans, et baise très-humblement les mains à la pauvre Bretagne[2]. Et vous, ma chère fille, qui êtes née et élevée dans ce pays-là[3], vous que j’ai toujours aimé et souhaité

  1. LETTRE 476. — François de la Troche (voyez tome III, p. 122) était entré dans les gardes du corps. Il figure dans l’État de la France de 1676 comme un des deux enseignes du maréchal de Rochefort (quatrième capitaine des gardes), de service au trimestre d’octobre. Il fut plus tard lieutenant des chevau-légers du Dauphin. — Deux lignes plus haut, l’édition de 1754 porte : « dans cette bonne ville de Paris. »
  2. Voyez la Notice, p. 196.
  3. L’édition de 1754 donne « dans ce pays. » Ce pays-là, qui est la leçon de 1734, s’entend naturellement de Paris et lève une des difficultés dont il est parlé dans la note de la p. 37 de la Notice. — Voyez tome III, p. 265 et 325.