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1676

592. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ ET DE CHARLES
DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Livry, mercredi 28e octobre.

de madame de sévigné.

On ne peut jamais être plus étonnée que je le suis, de vous voir écrire que le mariage de M. de la Garde est rompu. Il est rompu ! eh, bon Dieu ! n’avez-vous point entendu le cri que j’ai fait ? Toute la forêt l’a répété, et je suis trop heureuse d’être en lieu[1] où je n’aie de témoin de ce premier étonnement que les échos. Je saurai bien prendre dans la ville tous les tons d’une amie, et même je n’y aurai pas de peine. J’approuvois son choix, par la grande estime que j’avoîs[2] pour lui ; et par la même raison, je change comme lui. Plût à Dieu, ma fille, qu’il fût disposé à venir avec vous ! ce seroit bien là un conducteur comme je le voudrois.

Je suis surprise que votre assemblée ne soit point encore commencée[3]. M. de Pompone croyoit que ce dût être le 15e de ce mois. Vous passerez donc encore la Toussaint à Grignan ; mais après cela, ma fille, ne penserez-vous point à partir ? Je vous ai dit tant de choses là-dessus, et vous savez si bien ce que je pense, que je ne vous dirai plus rien[4]. Le frater est toujours ici, attendant les attestations qui lui feront avoir son congé. Il clopine ; il fait des remèdes ; et quoiqu’on nous menace de toutes les sévérités de l’ancienne discipline, nous vivons en paix, dans l’espérance que nous ne serons pas pendus. Nous

  1. Lettre 692. — 1. « En un lieu ; » et à la ligne suivante « témoins, » au pluriel. (Édition de 1754.)
  2. 2. « Que j’ai, (Ibidem.)
  3. 3. Voyez la note 3 de la lettre du 9 octobre précédent, p. 98.
  4. 4. « Que je ne dois plus vous rien dire. » (Édition de 1754.)