Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/135

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1676 les lois de chevalerie, qui faisoient jurer Sancho Pança, n’ont été si sévères ; et si don Quichotte eût eu pour lui un auteur aussi grave que M. de la Garde, il auroit assurément permis à son écuyer de changer de monture avec le chevalier de l’armet de Mambrin[1]. Profitez donc de M. de la Garde, puisque vous l’avez : accordez ensemble votre voyage, et songez que vous avez plusieurs devoirs à remplir. On est sûr de votre cœur ; mais ce n’est pas toujours assez : il faut des signifiances[2] Partagez donc vos faveurs et votre présence entre l’un et l’autre hémisphère, à l’exemple du soleil qui nous luit : voilà une assez belle façon de parler pour n’en pas demeurer là.

Adieu, ma belle petite sœur : j’ai toujours une cuisse bleue, et j’ai grand’peur de l’avoir tout l’hiver.

  1. 5. « Je n’ai pas de coutume, dit dom Quixotte, de dépouiller ceux que je vaincs, et si ce n’est point l’usage de chevalerie de leur ôter leurs chevaux et les laisser à pied, si ce n’étoit que le vainqueur eût perdu le sien en la bataille, car en tel cas, il est permis de prendre celui du vaincu, comme étant conquis en bonne guerre : tellement que, Sancho, laisse ce cheval, cet âne ou ce que tu voudras que ce soit, car comme son maître nous verra éloignés d’ici, il le reviendra querir. — Dieu sait si j’aurois envie de l’emmener, répliqua Sancho, ou pour le moins le changer avec le mien, qui ne me semble pas si bon, et véritablement les lois de chevalerie sont bien étroites, puisqu’elles ne s’étendent pas seulement à laisser changer un âne pour un autre. « (Dom Quixotte, Ire partie, chapitre xxi ; traduction de César Oudin.)
  2. 6. « Pierrot. Quand en a de l’amiquié pour les parsonnes, l’en en baille toujou queuque petite signifiance. » (Molière, Don Juan, acte II, scène 1re.)