Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/319

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1677 le mois de septembre ne contrefait ni l’été ni l’hiver, il est le plus beau mois de septembre que vous ayez jamais vu.

Madame disoit l’autre jour à Mme  de Ludres, en badinant avec un compas : « Il faut que je crève ces deux yeux-là qui font tant de mal. — Crevez-les, Madame, puisqu’ils n’ont pas fait tout celui que je voulois. » Cela seroit plaisant si c’étoit moi qui vous fisse[1] savoir tous les bons mots de cette belle.

Comment vous portez-vous, ma très-chère ? Ce mal de jambe, qu’est-il devenu ? Est-il possible que cela soit bon ? C’étoit donc une humeur qui vous tomboit sur la poitrine ; ce n’étoit pas seulement du sang échauffé. Et la pauvre petite, est-elle mieux ? Si vous m’aimez, ma très-chère, si vous m’aimez, tâchez de vous rengraisser. Ah ! que vous êtes maigre, puisque M. de Grignan en est inquiet.

Mardi au soir.

J’ai reçu[2] votre lettre du premier septembre. Que souhaitez-vous, ma fille ? Quel échange, quel trafic voulez-vous faire ? Ah ! gardez tout ce que vous avez ; souvenez-vous de ce que vous êtes, quand vous n’êtes point dévorée de tous les dragons du monde ; vous en aviez de bien noirs et de bien cruels à Paris ; mais quand vous voulez, quel charme et quel agrément ne trouve-t-on point dans votre humeur ? Je soupire souvent en parlant de vous et en pensant à vous. Je ne réponds point à votre lettre, de peur uniquement de vous fâcher ; car vous m’ôtez ma joie en m’ôtant le plaisir de vous entretenir ; mais il ne faut point vous contredire vous passez légère-

  1. 5. L’édition de 1734 a ici l’orthographe étrange fis, pour fisse.
  2. 6. Cet alinéa manque dans l’édition de 1734, ainsi que la date Mardi au soir.