Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/447

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1678 reçu : il y a une veste de satin de Venise qui sera, je pense, ce que vous me demandez. Si vous voulez outre cela une camisole de la Chine, je vous la porterai, mais mandez-le-moi dans la réponse à cette lettre. J’espère vous mander la paix assurée avant mon départ, car je suis fort lasse de vous dire toujours oui et non, sans fixer votre esprit. Ruvigny[1], qui étoit en Angleterre, a joint le Roi dans la marche, et le Roi l’a renvoyé. C’est un air de négociation qui fait croire qu’ils ne se déclareront pas. Cependant c’est le 25e que le Roi attend les réponses ; c’étoit le 20e :

  1. 8. Henri de Massues, sieur de Ruvigny, marquis de Bonneval, mais plus connu sous le nom de marquis de Ruvigny. Il avait épousé Marie Tallemant, sœur de Tallemant des Réaux. « Ruvigny, dit Saint-Simon (tome I, p. 412 et 413), étoit un bon mais simple gentilhomme, plein d’esprit, de sagesse, d’honneur et de probité, fort huguenot mais d’une grande conduite et d’une grande dextérité. Ces qualités… lui avoient donné beaucoup d’amis importants, et une grande considération dans le monde. Les ministres et les principaux seigneurs le comptoient et n’étoient pas indifférents à passer pour être de ses amis, et les magistrats du plus grand poids s’empressoient aussi à en être. Sous un extérieur fort simple, c’étoit un homme qui savoit allier la droiture avec la finesse de vues et les ressources, mais dont la fidélité étoit si connue, qu’il avoit les secrets et les dépôts des personnes les plus distinguées. Il fut un grand nombre d’années le député de sa religion à la cour, et le Roi se servit souvent des relations que sa religion lui donnait en Hollande, en Suisse, en Angleterre et en Allemagne, pour y négocier secrètement, et il y servit très-utilement. Le Roi l’aima et le distingua toujours, et il fut le seul, avec le maréchal de Schomberg, à qui le Roi offrit de demeurer à Paris et à sa cour avec leurs biens et la secrète liberté de leur religion dans leur maison, lors de la révocation de l’édit de Nantes ; mais tous deux refusèrent ; Ruvigny emporta ce qu’il voulut, et laissa ce qu’il voulut aussi, dont le Roi lui permit la jouissance. Il se retira en Angleterre avec ses deux fils, La Caillemotte, le cadet… mourut bientôt après. Le père ne survécut pas longtemps. » — Mme  de Scudéry (Correspondance de Bussy, tome IV, p. 71) écrit le 25 mars 1678 : « Ruvigny est encore en négociation en Angleterre, et l’on croit extrêmement la paix. »