Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/102

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1679 ment sa charge, que les courriers attendoient : il se justifie très-bien ; mais, mon Dieu ! ne voyez-vous pas bien son tort ? Ah ! que la pauvre Mme  du Plessis l’auroit aimé présentement ! quelle nouvelle liaison auroit fait cette conformité ! Rien ne pouvoit être si bon pour lui. Je n’en ai fait aussi mes compliments qu’à Mme  de Vins, m’entendez-vous bien ? car je réponds à ma pensée, qui, je crois, sera la vôtre. Toute la cour le plaint, et lui fait des compliments[1] ; vous lui allez voir reprendre le fil de ses perfections. Nous avons bien parlé de la Providence ; il entend bien cette doctrine. Jamais il ne s’est vu un si aimable ministre. M. Colbert, l’ambassadeur[2], va remplir cette belle place ; il est fort ami du chevalier ; écrivez à ce dernier toutes vos pensées : la fortune, toute capricieuse, voudra peut-être vous faire plus de bien[3] par là que par notre intime ami. Vous irez bien naturellement dans ce chemin par la route que je vous dis : pouvons-nous savoir ce que la Providence nous garde ?

Je continue mes soins à Mlle  de Méri. L’impression que fait dans son esprit le tracas de son petit domestique est une chose fort extraordinaire : elle me disoit qu’il lui semble, quand ils lui parlent[4], qu’ils tirent sur elle, comme pour la tuer ; elle en est plus malade que de ses maux ; c’est un cercle : sa colère augmente son mal, son mal augmente sa colère ; somme totale, c’est une chose étrange : je ne songe qu’à la soulager un peu.

Corbinelli abandonne Méré[5] et son chien de style,

  1. 16. Voyez la note 1 de la lettre du 18 décembre suivant.
  2. 17. M. Colbert de Croissy, frère du contrôleur général, étoit alors en Bavière, pour y négocier le mariage de Monseigneur avec Marie-Anne-Victoire de Bavière. ('Note de Perrin', 1754.)
  3. 18. « Plus de plaisir. » (Édition de 1754.)
  4. 19. « Quand ses gens lui parlent. » (Ibidem.)
  5. 20. Dans l’édition de 1754 : « le chevalier de Méré. » — Georges