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jours, et puis enfin d’Auxerre. Cette lettre m’étoit nécessaire. Je vous vois hors de ce bateau, où vous avez été dans un faux repos ; car après tout cette allure est incommode. Ne me dites plus que je vous regrette sans sujet : où prenez-vous que je n’en aie pas tous les sujets du monde ? Je ne sais pas ce qui vous repasse dans la tête ; pour moi, je ne vois que votre amitié, que vos soins, vos bontés, vos caresses ; je vous assure que c’est tout cela que j’ai perdu, et que c’est là ce que je regrette, sans que rien au monde puisse m’effacer un tel souvenir, ni me consoler d’une telle perte. Soyez bien persuadée, ma très-chère, que cette amitié que vous appelez votre bien, ne vous peut jamais manquer ; plût à Dieu que vous fussiez aussi assurée de conserver toutes les autres choses qui sont à vous ! Je ne vous reparle plus de votre voyage, dont le détail m’est cher ; vous êtes à Grignan ; il faut parler de la bise : comment vous a-t-elle reçue ? comment vous trouvez-vous ? Je saurai toute la suite de vos pas, et de la visite de Guitaut, et de Chalon, et de Lyon. Hélas ! ma chère enfant, je ne songe qu’à vous et à tout ce qui vous touche.


Mon cher Comte, vous aurez bien de l’honneur, si vous conduisez heureusement cette santé si délicate, et je vous en serai plus obligée que de tout ce que vous pourriez faire pour moi. Mesdemoiselles, je pense bien souvent à vous ; je vous redemande ici, l’une au jardin, et l’autre à l’escarpolette : rien ne me répond ; vous avez votre part à ma tristesse. Mon cher petit marquis, n’oubliez pas votre bonne maman.