Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/316

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1680 fils ressortit pour crever ; et après plusieurs agitations, plusieurs cabales, Gourville contre l’Anglois, Langlade pour l’Anglois, chacun suivi de plusieurs de la famille, et les deux chefs conservant toute l’aigreur qu’ils ont l’un pour l’autre, M. de Marsillac décida pour l’Anglois ; et hier, à cinq heures du soir, M. de la Rochefoucauld prit son remède ; à huit encore[1]. Comme on n’entre plus du tout dans cette maison, on a peine à savoir la vérité ; cependant on m’assure qu’après avoir été cette nuit à un moment près de mourir, par le combat du remède et de l’humeur de la goutte, il a fait une si considérable évacuation, que, quoique la fièvre ne soit pas encore diminuée, il y a sujet de tout espérer : pour moi, je suis persuadée qu’il en réchappera. M. de Marsillac n’ose encore ouvrir son âme[2] à l’espérance ; il ne peut ressembler dans sa tendresse et dans sa douleur qu’à vous, ma chère enfant, qui ne voulez pas que je meure. Vous croyez bien que dans l’état où il est, je ne lui donne pas la lettre de M. de Grignan ; mais elle ira avec les autres qui viendront ; car je suis convaincue avec Langlade, de qui j’ai appris tout ceci, que ce remède fera le miracle entier.

Je vous demande, ma fille, comme vous vous portez[3] de votre voyage de Marseille : je gronde M. de Grignan de vous y avoir menée ; je ne saurois approuver cette trotterie inutile. Ne faudra-t-il point aussi que vous alliez montrer Toulon, Hières, la Sainte-Baume, Saint-Maximin[4], et la Fontaine de Vaucluse, à Mlles de Grignan ?

Je suis quasi toujours chez Mme de la Fayette, qui

  1. 5. « Le remède. de l’Anglois, et à huit encore. » (Édition de 1754.)
  2. 6. « Son cœur. » (Ibidem.)
  3. 7. « Comment vous vous portez. » (Ibidem.)
  4. 8. Voyez tome III, p. 28, note 2, et p. 34, note 1.