Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/353

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aurez augmenté le clapier : ce sera peut-être d’un petit homme. Enfin croyez que je prends un grand intérêt à la poule et aux poussins. Le bon abbé est tout à vous.


1680

798. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Paris, samedi au soir 6e avril.

Vous allez apprendre une nouvelle qui n’est plus un secret, mais vous aurez le plaisir de la savoir des premières. Mme de Fontanges est duchesse, avec vingt mille écus de pension ; elle en recevoit aujourd’hui les compliments dans son lit. Le Roi y a été publiquement ; elle prend demain son tabouret, et s’en va passer le temps de Pâques à une abbaye que le Roi a donnée à une de ses sœurs[1]. Voici une manière de séparation qui fera bien de l’honneur à la sévérité du confesseur. Il y a des gens qui disent que cet établissement sent le congé ; en vérité, je n’en crois rien : le temps nous l’apprendra. Voilà[2] ce qui est présent : Mme de Montespan est enragée ; elle pleura beaucoup hier ; vous pouvez juger du martyre que souffre son orgueil ; il est encore plus outragé[3]

  1. Lettre 798. — 1. Jeanne, fille de Jean-Rigaud de Scorraille, comte de Roussille, et d’Aimée-Léonore de Plas, sœur aînée de Mme de Fontanges et de Mme de Molac, était religieuse de Saint-Benoit en l’abbaye de Farmoutier. Le Roi lui donna l’abbaye de Maubuisson (voyez la lettre du 1er  mai suivant). Elle fut, le 25 août de cette même année, bénite abbesse de Chelles, après la démission de Marguerite Guionne de Cossé, abbesse depuis 1676. Elle mourut en 1688, et le Roi donna de nouveau l’abbaye à Marguerite de Cossé (voyez le Journal de Dangeau, tome II, p. 131). Sur l’abbaye de Maubuisson, voyez les Environs de Paris, par M. Joanne, p. 467 et suivantes.
  2. 2. Dans le texte de 1754 : « voici. »
  3. 3. « …son orgueil, qui est encore plus outragé. » (Édition de 1754.)