Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/13

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1680 veut que tout le monde l’aime[1], très-rudement repoussée ; vous y verrez le vice couronné, les défenseurs de Jésus-Christ outragés : voilà un beau désordre ; et moi, petite femme, je regarde tout cela comme la volonté de Dieu, qui en tire sa gloire, et j’adore cette conduite, tout extraordinaire[2] qu’elle me paroisse ; mais je me garde bien de croire que si Dieu eût voulu que cela eût été autrement, cela n’eût pas été[3]. Mon Dieu ! ma fille, c’est bien moi qui vous prie de ne pas confier tout ceci à vos échos : ce sont des furies d’écrire qui renverseroient toute votre famille[4] ; je voudrois même que vous les cachassiez à M. de Grignan. Je fais toujours la résolution de me taire, et je ne cesse de parler : c’est le cours des esprits que je ne puis arrêter. Corbinelli, avec sa philosophie, n’a jamais osé approcher de ceux qui sont en mouvement pour vous aimer ; ce sont des traces qu’il respecte, et qu’il trouve ineffaçables[5].

Le bon abbé vous assure toujours de son amitié, et vous répond, pour l’année qui vient, de toute sûreté dans sa forêt de Livry[6], où j’espère que nous nous reverrons.

Vous êtes donc habile, ma chère enfant, vous vous

  1. 27. Voyez tome VI, p. 506, et la note 33.
  2. 28. « Quelque extraordinaire. » (Édition de 1754.)
  3. 29. Voyez sur tout ce passage, tome VI, p. 560.
  4. 30. Mme de Sévigné craignait que les opinions qu’elle avait adoptées ne devinssent nuisibles à la fortune des prélat de la maison de Grignan. (Note de l’édition de 1818.) Voyez la lettre du 15 juin précédent, tome VI, p. 459, et la note 19. — Ce membre de phrase n’est pas dans l’impression de 1754, qui donne, au membre suivant « que vous le cachassiez. »
  5. 31. « Incurables. » (Édition de 1737.) Voyez les lettres du 4 et du 20 octobre 1679, tome VI, p. 33, et p. 56 et 57.
  6. 32. « Et vous répond de toute sûreté, l’année qui vient, dans la forêt de sa jolie abbaye. » (Édition de 1754.) — Voyez tome VI, p. 514 et 553.