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1683

923. — DU COMTE DE BUSSY RABUTIN À MADAME DE SÉVIGNÉ.

Le même jour que je reçus cette lettre, j’y fis cette réponse.
À Chaseu, ce 19e décembre 1683.

Je vous envoie la procuration que vous me demandez, Madame ; je viens d’envoyer à Mme de Toulongeon la lettre que vous lui écrivez. Pour celle de mon beau-frère[1], elle n’étoit pas dans votre paquet ; mais je lui ferai voir votre lettre, et je ne doute pas qu’il ne fasse réponse à celle qu’il n’a pas reçue.

Les réflexions que vous faites sur les ténèbres où nous marchons sont les plus justes du monde. Il est vrai qu’il semble que Dieu donne des succès contraires à nos craintes et à nos[2] espérances, exprès pour confondre la prudence humaine, et quand même il fait réussir ce que nous avons souhaité, il le fait souvent par des moyens contraires à ceux que nous avions employés, pour nous montrer qu’à lui seul appartient l’honneur des événements, et que notre raison n’est qu’une bête. J’ai éprouvé cela en mille rencontres, mais particulièrement depuis deux ans. Ce que je fais, c’est de prier Dieu de m’aider dans la conduite de mes desseins. Je m’aide bien moi-même, et je lui dis : « Votre volonté soit faite[3]. » Voilà,

  1. Lettre 923. — 1. « Pour mon beau-frère, il n’a pas eu la sienne, je ne l’ai pas trouvée dans votre paquet ; mais je lui ai fait voir votre lettre, et je ne doute pas qu’il ne fasse réponse à la lettre qu’il n’a pas reçue. » (Manuscrit de la Bibliothèque impériale.)
  2. 2. Le manuscrit que nous suivons d’ordinaire est interrompu après ce mot nos. Six folios ont été détachés, sans doute parce qu’ils contenaient des passages relatifs au procès de Mme de Coligny contre la Rivière. Cette lacune va jusqu’au 4 juin 1685.
  3. 3. « Je m’aide bien moi-même, mais après cela je compte sur lui, et ne compte que sur lui. Voilà, etc. » (Édition de 1818.)