Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/449

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Providence règle tout. Elle ne trouve pourtant pas mauvais que nous fassions des desseins ; elle veut même que nous nous aidions, mais seulement que nous ne nous confiions pas trop en nos forces. Je vous plains étrangement sur la séparation de vous et de Mme de Grignan, après même dix mois d’absence. Votre grand cousin de Toulongeon n’a bougé de chez lui que pour venir deux ou trois jours à Dijon pendant les états, où il a fait ériger sa terre d’Alonne[1] en comté sous le titre de Toulongeon ; ainsi donnez-vous bien de garde quand vous lui écrirez de mettre à la suscription de sa lettre à Alonne ; je lui écrivis dernièrement À M. le comte d’Alonne, à Toulongeon. Il n’est pas possible qu’il ne vous ait point fait de réponse ; il sait trop bien vivre pour y avoir manqué, et ce n’est pas l’excès de la douleur de sa perte qui l’en a empêché[2].

Je vous demande pardon, Madame, si je vous assure que l’oraison funèbre de Madame votre tante est fort mal faite, et qu’il y a bien d’autres impertinences que celle que vous avez remarquée. Elle ne fut pas si mauvaise quand elle fut prononcée : l’auteur prit bien de la peine à la gâter avant que de la mettre sous la presse.

Au reste, Madame, ne craignez pas que les malheurs m’abattent ; on s’endurcit pour de moindres que ceux qui me sont arrivés. Dieu me donne une force de corps et d’esprit qui me surprend, et qui feroit trembler mes ennemis, s’ils la connoissoient sans connoître ma crainte pour le Seigneur[3].


  1. 4. Alonne était du bailliage de Montcenis (au sud d’Autun). Voyez Walckenaer, tome IV, p. 195.
  2. 5. « Au moins ne seroit-ce pas l’excès de la douleur de sa perte qui l’en auroit empêché. » (Manuscrit de la Bibliothèque impériale.) L’alinéa suivant ne se lit que dans ce manuscrit.
  3. 6. Ces derniers mots : « sans connoître ma crainte pour le Sei-