Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/81

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1680 étoit cette petite compagnie qui nous a fait jouer ; c’étoit une assez jolie femme de Vitré, qui a couché ici trois nuits : elle aime à jouer, et nous avions rassemblé les Launays, et nous ne cessions de jouer.

Mlle  de Grignan emploie bien mieux son temps : qu’elle est heureuse ! En relisant plus exactement votre lettre, je vois qu’elle parle confidemment de ses desseins à Mme  du Janet, et que c’est de la conversation qu’elle a eue avec M. de Grignan qu’elle ne lui parle point ; j’admire assez qu’on dise l’un sans l’autre ; mais enfin elle sent la douceur de parler avec cette bonne et sage personne de ce qui la touche sensiblement. J’honore plus que jamais les conduites de la Providence, quand je songe qu’elle me fait profiter des pas que vous allez faire ; et je commence dès à présent à jouir de ce bonheur à venir.

Je vous demande mille pardons, je trouve un petit livre de madrigaux[1]. le plus joli du monde : il faut que je travaille cet hiver à les remettre bien avec vous. C’est un plaisir, ma belle, que de n’avoir point de mémoire : nous relisons Sarasin, et je suis aussi aise que la première fois ; des petites Lettres, tout de même : ce sont des lectures nouvelles ; nous y en ajoutons encore, selon nos fantaisies, sans beaucoup de règle, mais avec bien du plaisir : votre frère est d’un grand commerce sur ces sortes d’amusements. J’ai voulu tâter des Préjugés[2], que je trouve admirables ; et ce qui donne le prix à tout cela, ma très--

  1. 6. Les madrigaux de la Sablière. (Note de Perrin.) Ils venaient de paraître chez Barbin, publiés par son fils, en un volume in-12 de 167 pages ; le privilége est daté du 26 mai. Voyez tome II, p. 95, note 6
  2. 7. Ouvrage de M. Nicole, intitulé : Préjugés légitimes contre les Calvinistes. (Note de Perrin.) — L’achevé d’imprimer pour la première fois est du 8 octobre 1671.