Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 8.djvu/25

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1687 un grand gouvernement sera rempli, un frère ne pleurera pas la mort de l'autre. Vous m’avouerez que cette justesse est plaisante. Voilà cette maison de Créquy bien abattue, et de grandes dignités sorties en peu de jours de cette famille.

Le duc d’Estrées[1] est mort à Rome ; et le jour qu’on en reçut la nouvelle à Paris, la duchesse d’Estrées, sa belle-mère, votre cousine, mourut aussi du reste de son apoplexie. Le chanoine[2] est inconsolable ; et je crois que M. de Montataire lui doit donner, par générosité, quelque légère pension, et la laisser pleurer et mourir en paix.

Vous voyez bien, mes pauvres enfants, que rien n’est si triste que cette lettre : si j’en écrivois souvent de pareilles, il vaudroit mieux être encore enchantés. Votre belle et bonne humeur, et cette gaieté si nécessaire et si salutaire n’y pourroient pas résister. Parlons d’un autre temps. J’ai trouvé sous ma main par hasard Moréri[3] : j’ai

  1. 6. François-Annibal, duc d’Estrées, ambassadeur extraordinaire de France à Rome depuis quinze ans, mourut d’apoplexie, dans cette ville, le 30 janvier 1687 ; et Gabrielle de Longueval Manicamp, maréchale d’Estrées, sa belle-mère, mourut à Paris, de la même maladie, le 11 février suivant.
  2. On a vu souvent (voyez tome III, p. 32, note 6) qu’on appelait ainsi Françoise de Longueval, chanoinesse de Remiremont, sœur de la maréchale d’Estrées. La comtesse de Bussy, aidée de sa fille Mme de Montataire, soutenait un procès considérable contre la famille de Longueval Manicamp (voyez la lettre du 8 juillet 1680, tome VI, p. 517, et note 7). Cette dernière maison était tellement ruinée, ainsi que Bussy le dit dans la lettre précitée, que le Roi donnait de temps en temps des secours à la duchesse d’Estrées, pour l’aider à subsister. Voyez le Journal de Dangeau, au 11 février 1687.
  3. 8. Louis-Moréri, aumônier de l’évêque d’Apt, né à Bargemont en Provence, mort à Paris, en 1680, à l’âge de trente-sept ans, avait publié en 1674 la première édition de son Grand Dictionnaire historique, à Lyon, en un volume in-folio. La seconde, préparée par lui, parut en 1681, en deux volumes ; elle a en tête une dédicace à