Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 8.djvu/287

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1092. DE MADAME DE SÉVIGNÉ: A MADAME DE GRIGNAN.

A Paris, mardi 23è novembre.

LE chevalier partit hier pour Versailles, ma chère Comtesse il veut être tout rangé pour recevoir Monsieur le Dauphin, et peut-être aller au-devant de lui avec le Roi[1]. Votre enfant est en marche aussi, avec la satisfaction d’avoir fait la plus heureuse campagne qu’on pût souhaiter, si on l’avoit imaginée à plaisir ; car vous croyez bien que nous n’y aurions pas oublié la contusion, sur quoi nous sommes accablés de compliments, et vous aussi : tenez voilà tous ceux de Mmes de Lavardin, d’Uxelles, de la Fayette, de Mlle de la Rochefoucauld ; mais tout cela si bien[2] qu’il ne faut pas les confondre. Mme de Lavardin jure et proteste que le marquis a son mérite personnel, et que jamais rien n’a été si heureux pour lui que cette campagne. Nous causons souvent, le chevalier et moi : nous vous souhaitons bien de la santé et bien de la force pour soutenir tout ce que vous trouvez en votre chemin. Ici on a bien des distractions ; là on n’en a point : on tourne toujours sur le même pivot. Nous vous conjurons de penser à votre santé préférablement à tout. Le café est disgracié[3] , et par conséquent je n’en

  1. LETTRE 1092. 1. Voyez ci-après la lettre du 30 novembre, p. 290.
  2. 2. « Si bon. » (Édition de 1754.)
  3. 3. Il y avait alors, paraît-il, une grande prévention contre l’usage du café. On lit dans la Correspondance de Madame (traduite par M. G. Brunet, tome I, p. 128 et 129, lettre du 18 mars 1711) « Je vois tous les jours ici des gens qui ont été forcés de le quitter (le café), à cause des grandes maladies qu’il leur a causées. La princesse de Hanau en est morte avec d’horribles souffrances. On a trouvé après sa mort que le café avait causé dans son estomac une centaine de petits ulcères. » Parlant du gouverneur de Flandre Montberon (voyez plus bas, p. 337), mort en 1708, Saint-Simon ici