Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/212

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qu’elle ne prononce rien ; mais il faut dire, comme Molière « Qui est le sot mari qui seroit fâché que sa femme fût muette[1] ? » Vraiment, je ne suis ni bègue ni muette : c’est une fureur. Il faut que je vous dise encore que je suis très-fâchée que vos fermiers commencent à vous payer aussi mal que les nôtres : cela joint à la privation du Comtat. Ne parlons point de cela, non plus que des ravages du temps sur nos pauvres personnes, et enfin sur nos vies. Il falloit finir plus gaiement : je n’y saurois que faire, dixi[2].

I2l6.-- DE MADAME DE SÉVIGNÉ

A MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, dimanche 18è septembre.

J’ai enfin reçu cette lettre du premier septembre, ma fille ; elle étoit allée à Rennes ; c’est un voyage que mes lettres font quelquefois : on met dans un sac ce qui devroit être dans l’autre, on ne sait à qui s’en prendre[3] mais la revoilà ; j’aurois été bien fâchée de la perdre : elle me fait une liaison de conversation qui m’instruit de tout ce qui m’échappoit. Parlons vitement de la visite2. « du récit de la visite. » (Ibidem.) de ce bon duc de Chaulnes, de la réception toute magnifique, toute pleine d’amitié que vous lui avez faite : un grand air de maison, une bonne chère deux tables comme dans sa Bretagne<ref>3. « Comme dans la Bretagne. (Edition de 1737.)</ref3, servies à la grande, une« 

  1. 16. Voyez, la scène VI du IIè acte du Médecin malgré lui, où Sganarelle dit : « Et qui est ce sot-là, qui ne veut pas que sa femme soit muette ?
  2. 17. « J’ai dit. »
  3. LETTRE 1216. 1. « Et le moyen de savoir à qui s’en prendre ? (Édition de l754)