Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/293

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belle-soeur vous dit mille choses honnêtes et tendres : une de ses folies, c’est de me faire parler de vous. J’embrasse M. de Grignan ; je ne sais plus où j’en suis des autres : je crains bien qu’en écrivant cette lettre[1] tous les oiseaux ne s’en soient envolés. Nous avons eu ici quelque temps votre soleil : vous aviez nos pluies ; mais depuis deux jours je crois que tout retourne à sa place : ainsi vous avez beau temps. Pauline m’a écrit une lettre charmante ; elle me dit audacieusement qu’elle ne craint point de détruire, qu’au contraire elle prétend surpasser les louanges que Coulantes lui donne ; qu’elle apprend l’italien, que vous êtes sa maîtresse, qu’elle lit le Pastor fido; et puis me fait une question fort plaisante, la friponne ! vraiment, je la renvoie bien chez ses parents.

123l. DE MADAME DE SÉVIGNÉ

A MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, mercredi 2è novembre.

JE reçois toutes vos lettres, ma fille, mieux que quand il faisoit beau. Cependant le ciel de votre Provence est dans un état qui fait peur[2]; vous n’êtes point accoutumés à ces déluges ; vous me représentez votre château dans un grand désordre, et si vous n’avez pas sauvé tous vos beaux meubles, et surtout celui de votre cabinet[3], digne de Versailles, je serai bien affligée. Nous commençons[4]

  1. 18. « Qu’à l’arrivée de cette lettre. » (Édition de 1754.)
  2. LETTRE 1231. 1 -- ̃« Dans un désordre qui fait peur, » (Édition de 1737.)
  3. 2. Le grand cabinet, à Grignan, était meublé en damas cramoisi, galonné en or. (Note de l'édition de 1818.)
  4. 3. « Vous me représentez votre château dans un état qui me donne beaucoup de peine. Nous commençons, etc. » (Édition de 1737.)