Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/421

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dans la Vieille-Castille, mort en 1591 travailla avec sainte Thérèse à la réforme des Carmes, et fonda les Carmes déchaussés. Il fut béatifié en 1675, et canonisé en 1726. Aussi Mme de Sévigné ne l’appelle-t-elle pas saint, mais bienheureux. Ses ouvrages mystiques ont été traduits en français par le P. Cyprien (Paris; 1641 > in-4o)> par le P. Louis de Sainte-Thérèse (Paris, 1665, in-4o), et par le P. Maillard (Paris, 1694, in-4o). Voyez Walckenaer, tome IV, p. 325.

A propos de Corbinelli, il m’écrivît l’autre jour un fort joli billet ; il me rendoit compte d’une conversation et d’un dîner chez M. de Lamoignon : les acteurs étoient les maîtres du logis, Monsieur de Troyes, Monsieur de Toulon[1] , le P. Bourdaloue, son compagnon, Despréaux et Corbinelli. On parla des ouvrages des anciens et des modernes ; Despréaux soutint les anciens, à la réserve d’un seul moderne, qui surpassoit à son goût et les vieux et les nouveaux. Le compagnon du Bourdaloue qui faisoit l’entendu, et qui s’étoit attaché à Despréaux et à Corbinelli, lui demanda quel étoit donc ce livre si distingué dans son esprit ? Il ne voulut pas le nommer, Corbinelli lui dit « Monsieur, je vous conjure de me le dire, afin que je le lise toute la nuit[2]. » Despréaux lui répondit en riant « Ah. Monsieur, vous l’avez lu plus d’une fois, j’en suis assuré. » Le jésuite reprend, et presse Despréaux de nommer cet auteur si merveilleux, avec un air dédaigneux, un cotai riso amaro[3]. Despréaux lui dit « Mon Père, ne me pressez point. » Le Père continue. Enfin Despréaux le prend par le bras, et le serrant

  1. 24..Armand-Louis Bonnin de Chalucet, nommé évèque de Toulon en 1684, mort en 1712. Sa sœur, Anne-Louise Bonnin de Chalucet, avait épousé Nicolas de Lamoignon, marquis de la Mothe, frère puîné du marquis de Basville.
  2. 25. « Despréaux ne voulut pas lui dire. Corbinelli se joint au jésuite, et conjure Despréaux de nommer ce livre, afin de le lire toute la nuit. » (Édition de 1754.)
  3. 26. « Le jésuite reprend avec un air dédaigneux, un cotal riso amaro, et presse Despréaux de nommer cet auteur si merveilleux. (Ibidem.) Sur ces mots italiens un ris si amer, voyez tome VI, p. 452.