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Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/434

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vous pussiez savoir combien je sens, quoiqu’à deux cents lieues de vous, toutes vos peines. Mais qu’on écrit ridiculement, quand on est si loin ! Je vous mande souvent des folies par le plaisir de causer avec vous, et je ne devine point que vous êtes entourée et accablée de mille sujets de tristesse ; j’en suis véritablement honteuse. Mme de la Fayette me parle de vous et de Monsieur le chevalier dans tous ses billets ; elle ne se porte point bien, elle me prie de vous dire ses maux, et qu’elle n’a pas laissé d’être ravie du régiment de votre enfant : sa petite belle-fille a été approuvée à Versailles, même de Sa Majesté[1] ; elle ne se mêle plus de rien, elle sent la douceur et le soulagement de cette nouvelle famille.

Si vous aviez vu la réponse de Monsieur d’Aix, vous la trouveriez bien sérieuse, et d’un style qui ne lui ressemble point du tout, ni à la lettre que je lui avois écrite. La destinée de cet homme qui voulut mourir opiniâtrement au pied d’un arbre, est affreuse ; c’est du désespoir il étoit arrêté là comme par un pacte : ; votre récit ne me fit point crier, il m’étonna, et me toucha d’une manière convenable au sujet. Vous êtes bien cruelle de vous souvenir de Montfermeil : c’est sans contredit le plus ridicule endroit de ma vie ; n’en avez-vous point quelque autre dans l’imagination ? chassez celui-là, je vous prie ; c’étoit un sort qu’on avoit jeté sur moi. Adieu ma très-chère et très-aimable, je suis toute triste de vous eh ! le moyen d’être autrement ? deux ans sans le revenu de votre charge[2], et tout ce que vous avez à soutenir, et vos arrérages, et Paris, et enfin tout. Ce grand édifice

)

  1. 7. Mme de la Fayette la jeune parut ces jours passés à la cour pour la première fois ; il y a un mois que ce mariage est fait; elle est fille de M. de Marillac, et a eu deux cent mille francs. » (Journal de Dangeau, Marly, 11 janvier 1690.
  2. 8. Voyez la note 1 de la lettre du 1er février suivant, p. 436.