Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/79

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vous oblige. Quand je songe que vous êtes à Grignan, ̃ que vous voyez ma fille, ah! que je vous envie, et que je voudrois bien être avec vous que j’aurois de choses à vous mander de sa santé, de sa beauté, de ses chagrins, de ses affaires! mais il ne faut point troubler votre joie.

À MADAME DE GRIGNAH.

JE reviens à vous, ma chère bonne, et 8. [1] pour expédier le chapitre de la santé, je vous assure que j’ai pris ces deux médecines, dont vous fûtes si étonnée, sans aucune sorte d’incommodité, et seulement pour les avoir prises et satisfaire aux auteurs qui disent qu’il se faut purger de temps en temps[2] Je vous dis la pure vérité, et ma santé est si parfaite que j’en suis effrayée : il n’est pas naturel de n’avoir aucune des incommodités que j’avois ; je ne sais ce que la Providence me garde ; en attendant, je ne prodigue point ma santé, je mange sagement, je n’ai plus la fantaisie du serein ni de la lune; je commence à me corriger de ces folies10.[3], et je trouve plaisant qu’à Livry j’en étois encore toute pleine, comme à vingt ans ; cela n’est plus. Après avoir bien lu, bien causé, on se sépare

  1. Ces mots « Je reviens à vous, ma chère bonne, et, » ne sont que dans notre manuscrit. Dans l’édition de 1737, le commencement de cet alinéa est ainsi abrégé « Je vous ai mandé, ma chère enfant, que ma santé étoit si parfaite que j’en étois effrayée : il n’est pas naturel de n’avoir, etc. » Dans celle de 1754, on lit çe commencement « Pour expédier le chapitre de la santé, je vous assure que la médecine que j’ai prise n’a été que pour satisfaire aux auteurs qui disent qu’il se faut purger de temps en temps; et il est vrai que je me porte si bien que j’en suis effrayée : il n’est pas naturel en effet de n’avoir, etc. »
  2. 9. Un de ces auteurs est Hyppocrate lui-même. Voyez dans ses Oeuvres complètes (Edition de M.Littré, tome VI, p.79) le chapitre V du traité intitulé du régime salutaire.
  3. « de mes folies » (Edition de 1737.)