Aller au contenu

Page:Sacher-Masoch - A Kolomea - Contes juifs et petits russiens, 1879.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
142
À KOLOMEA.

— Il a raison, fit observer M. Kauwigki. Ne le tourmentez pas. Qu’un autre se rende à la forêt. »

Ce disant, il monta rapidement l’escalier. Le jeune abbé le suivit.

Le paysan jeta les rênes sur le dos de son cheval et fit mine de s’éloigner sans bruit.

« Saisissez-le ! » cria la baronne.

Le Cosaque le saisit par sa manche et le ramena de force dans la cour.

« Que me voulez-vous ? demanda Kwitka avec froideur. Je suis quitte du robot durant cette semaine.

— Serais-tu aussi un haydamak[1], par hasard ? T’aviserais-tu de te révolter ?

— Iras-tu à la forêt ? reprit la baronne, pâle de colère et jetant son cigare au loin.

— Non.

— C’est le kautschuk qui t’y forcera. Alors, apportez-le. »

Et, bien que sa petite main délicatement veinée tremblât, elle retint vigoureusement le paysan par son habit, tandis que, de l’autre, elle le frappait à tort et à travers avec le gourdin. Kwitka protégeait habilement sa tête avec son bras. Il n’opposa aucune résistance et supporta les coups, fort tranquille, jusqu’à ce qu’elle laissât tomber le fouet, épuisée. Elle prit alors le malheureux par les cheveux, à deux mains, elle le secoua rudement, le foula aux pieds, puis le regarda se relever tout meurtri.

« Eh bien ! qu’est-ce que tu en as maintenant ? dit le Cosaque.

  1. Brigand, primitivement paysan insurgé.