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L’ENNEMI DES FEMMES

lies pour madame Ossokhine. — D’autant plus, ajouta-t-il, qu’à une attraction naturelle se joint une arrière-pensée de vengeance conjugale.

— Que voulez-vous dire ? demanda madame Pirowska surprise.

Diogène insinua doucement, charitablement, de ce ton galant qui fait pénétrer la confidence en ne semblant qu’effleurer l’esprit, que M. Pirowski avait été probablement averti de l’amour ancien du major Casimir pour la belle madame Pirowska. En voyant revenir le major chez lui, il avait pu croire à la reprise d’un sentiment mal éteint. La conscience du mari se croyait dégagée par la coquetterie supposée de sa femme.

Il en est de la calomnie comme de la flatterie. La plus grosse a autant de chances que la plus fine. J’ai besoin de faire cette remarque pour expliquer toutes les manœuvres de Diogène, assez méprisant pour compter sur la sottise humaine beaucoup plus que sur son habileté personnelle. Ce conte absurde débité d’un ton léger produisit, malgré tout, une impression sur madame Pirowska.

Selon la logique de la passion féminine (le mot passion veut dire simplement ici regret ou dépit), madame Pirowska en voulut à son mari des griefs vraisemblables qu’il avait contre elle ; et quand Diogène la quitta, après ces piqûres, elle était bien décidée à taquiner, à exaspérer cette jalousie de M. Pirowski, à faire du major son complice autant qu’elle le pourrait, sans se compromettre,