Page:Sacher-Masoch - L’Ennemi des femmes, 1879.djvu/179

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
169
L’ENNEMI DES FEMMES

— Allons donc ! je vais vous comparer à panna Scharow qui en a cinquante-cinq. Vous laverez votre figure, et nous verrons.

— Monsieur, vous n’êtes pas galant !

— S’agit-il d’être galant ? Non. Vous vendez votre mine tous les soirs : eh bien ? ne frelatez pas la marchandise.

— C’est horrible ! — s’écria la dame — une mère de famille ainsi insultée !

— Ce qui est horrible, c’est de faire l’enfant gâtée quand on est mère et peut-être grand’mère ; c’est de croire que nous n’y voyons pas, que nos yeux, nos oreilles nous trompent. Jouez des rôles de vieille, et, si vous les jouez bien, on applaudira ; mais laissez les petites mines aux petits minois.

L’actrice, suffoquée, ne trouva plus un mot à répliquer.

Elle avait fait le mouvement de relever son voile, pour attendrir ou séduire l’inflexible Gaskine. Elle le ramena et l’assujettit sur son visage, et sortit en haussant superbement les épaules.

— C’est bon — dit le vieux paysan. — Elle a reçu sa leçon. Maintenant, quand elle jouera les rôles de grand-mère, j’irai la voir, et je vous dirai ce qu’il faut en penser.

Gaskine, on le voit, tournait légèrement au despote.

Fort heureusement, son règne devait être court et ne pouvait que profiter à la vérité.

Cette esquisse, très réelle et très historique, d’un