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L’ENNEMI DES FEMMES

— Oui, mademoiselle.

— N’est-ce pas un propriétaire, pan Melbachowski[1] ce grand jeune homme brun ?

— En effet.

— Et ce jeune homme à la chevelure de filasse ? continua la jeune fille, qui gardait pour la fin la question qui l’intéressait le plus.

— C’est un poète, Jaroslaw. Il est fort jeune, il a vingt ans, je crois, et beaucoup de talent.

— Il fait bien d’avoir du talent, car il est laid comme un singe, repartit vivement Petrowna.

— Un homme d’esprit n’est jamais laid, répliqua le vieux Français ; ce jeune homme est seulement un peu trop blond.

Les deux jeunes filles se mirent à rire.

— Ne suis-je pas blonde aussi ? demanda Petrowna.

— Oh ! c’est autre chose, balbutia le vieillard, le blond est une couleur magnifique.

— Quel est le jeune homme du milieu ? dit enfin Petrowna.

— Il est gentil garçon, n’est-ce pas ? C’est un employé supérieur à la direction du cercle[2]. Il est arrivé depuis peu de jours ; il habitait Lemberg ; il a de la fortune. C’est le fils d’un pope petit-russien.

— Il se nomme ?

  1. Pan, monsieur ; panna, madame ou mademoiselle. Pan a à peu près la signification de esquire en anglais.
  2. La Galicie est divisée en cercles.