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L’ENNEMI DES FEMMES

Le fermier lui dénoua le mouchoir qui le bâillonnait, mais lui laissa les mains et les bras attachés, et se reculant un peu lui dit :

— Maintenant, parlez !

— Qu’est-ce que cela signifie, père Gaskine ! qui vous a donné le droit de commettre une pareille violence ?

— Le droit, je l’ai pris dans mon amitié pour quelqu’un que vous offensez, — répondit le vieux paysan. — Il se passe dans ce pays des choses abominables. Les plus nobles créatures sont tourmentées et dédaignées. Pan Diogène Kamenowitch a reçu une leçon qui lui servira. C’est à votre tour maintenant.

— Est-ce que vous allez me proposer un duel, au nom de Petrowna ?

— Je n’en sais rien, c’est elle qui décidera.

— Ainsi c’est elle qui m’a fait enlever ?

— Non. Seulement elle a confiance en moi, et je me suis fait son serviteur. Elle sait que je ne puis tolérer l’injustice et la trahison. Elle m’a dit qu’elle voudrait pouvoir vous parler tout à fait seule, loin des mauvaises langues. Je lui ai promis cet entretien. Je la préviendrai demain matin que vous l’attendez. Vous ne sortirez d’ici que quand vous lui aurez juré de ne plus la faire souffrir.

Constantin écoutait, ébahi, partagé entre la tentation de rire et celle de s’indigner.

— Savez-vous bien, monsieur Gaskine, que vous avez commis là un acte fort grave ?

— Je le sais.