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L’ENNEMI DES FEMMES

soient des roses ! souffla le père de famille intimidé.

— Tu m’avais promis de planter des fraises, reprit Petrowna d’un air sévère.

— Si je te l’ai promis, j’ai dû le faire, soupira M. Pirowski, s’abandonnant à son sort.

— À moi, tu avais promis des roses ! repartit Léopoldine, qui courut vers le carré en question.

— Oui, je te l’avais promis.

— Mais, moi, dit madame Pirowska d’un ton placidement formidable, je t’avais exprimé le désir qu’il y eût là des pommes de terre !

— Je ne le nie pas.

Une dispute, qui fût devenue sérieuse, si Petrowna ne l’eût pas entrecoupée de grands éclats de rire moqueurs, s’éleva alors. Chacun des trois voulait faire triompher son fruit, sa fleur, ou son légume ; le brave vieux gentilhomme essayait d’apaiser tout le monde, en assurant qu’il avait planté à la fois des pommes de terre, des roses et des fraises quand un domestique vint annoncer, au dernier coup de midi qui sonnait, la visite de Diogène et du major.

Cette annonce calma l’orage intérieur et parut surprendre toute la famille.

Madame Pirowska, qui avait été vérifier le terrain suspect, reprit sa place dans le kiosque. Léopoldine s’assit en face d’elle et commença à descendre très lentement les manches relevées de sa kazabaïka, mettant ainsi en évidence, sous prétexte de les cacher, ses beaux bras dont la blan-