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Page:Sacher-Masoch - La Czarine noire et autres contes sur la flagellation, 1907.djvu/64

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L’AMOUR CRUEL

— Lève-toi, dit celle-ci au vieillard. Qui se plaint encore ?

Une femme demi-nue se pressa à travers la foule et embrassa les genoux de Narda.

— J’accuse Gedmyn devant Dieu et devant toi, cria-t-elle. Il m’a volé ma fille, il a profané ma pauvre et belle enfant…

— Assez ! fit Narda brusquement.

Ses lèvres et ses narines mobiles frémissaient.

Se tournant vers le boyard :

— As-tu un droit sur sa fille, Gedmyn ?

Le jeune homme répondit par un éclat de rire et, tournant sur ses talons, alla rejoindre ses amis.

Alors deux hommes s’avancèrent simultanément. L’un, vigoureux, portait la blouse de toile des paysans ; l’autre, habillé de drap fin, était un rusé marchand.

— Qui accusez-vous ?

— Gedmyn, le puissant boyard.

— Parle, toi, le premier, dit la czarine, en s’adressant au marchand. Que t’a-t-il fait ?

— Pas grand’chose, dit le plaignant d’un air sournois. Il a attaqué les voitures qui m’apportaient des marchandises du Levant et pris ce qui lui plaisait.