pleine d’espérance et de foi dans l’avenir. C’était à lui que je devais tout cela.
Quand il revint, je tendis mes deux mains à sa rencontre, sans autre intention que celle de le remercier. À cette époque déjà, il m’était plus cher que tout au monde ; c’était le premier homme que j’estimais ; je ne pensais plus à me venger de lui ; au contraire, je cherchais son approbation, ses louanges, et j’étais prête à sacrifier ma vie pour son amour. Julian, de son côté, me fit bientôt la confidence de tous ses secrets. Il m’apportait plusieurs chapitres d’une nouvelle, des scènes d’une comédie, des canevas de romans. Il me laissait entrevoir son rare talent, alors qu’il était encore en herbe ou qu’il commençait à bourgeonner, et je compris combien son entourage bourgeois et le milieu où il vivait retardaient son développement. Il me sembla que j’étais destinée à devenir sa muse et que je n’avais été créée que pour lui. Aussi, dans le but de remplir les vides de mon éducation, je me mis à lire les classiques anglais, allemands et français, même Dante et l’Arioste. Je me mis à fréquenter le théâtre, non pour coqueter, comme je le faisais jadis, mais pour exercer mon jugement. Lorsque mes critiques, mes remarques réjouissaient Julian, lorsqu’il les approuvait, et parfois modifiait à mon idée quelqu’un de ses poèmes, je ressentais une joie,