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Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/128

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LA FEMME SÉPARÉE

comme les oreilles d’un noyé, je tendis instinctivement mes mains à Julian en poussant un cri, et je tombai. Je m’évanouis.

Toute la salle s’alarma. Julian m’apporta de l’eau, tandis que mon mari et quelques dames me venaient en aide. Je revins lentement à moi. Mon premier regard fut pour Julian, qui était penché anxieusement vers moi. Sans me rendre compte, de l’endroit où j’étais, de ce que je faisais, je passai ma main sur son front, doucement.

Lorsque je repris mes couleurs, tout le monde se remit à danser.

Je restai dans mon fauteuil, enveloppée dans un châle. Je regardai en souriant le gai tourbillon ; Julian, assis à mes côtés, tint ma main serrée dans les siennes jusqu’au matin.

Mme de Kossow s’arrêta. Pendant son récit, la nuit était tombée. Tout était sombre.

— Cette obscurité me fait mal, murmura-t-elle. Me voyez-vous ? Moi, je ne vous vois plus, et il me semble que les fantômes du passé se rassemblent auprès de moi et me font des signes de leurs mains blanches. De la lumière ! de la lumière !

La porte s’ouvrit. Un rayon pâle s’étendit sur le parquet jusqu’à ses pieds.

— De la lumière, du thé, des cigarettes ! dit-elle d’une voix brève.