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Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/231

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LA FEMME SÉPARÉE

dit qu’un homme ne doit pas s’attaquer aux lois de la nature, aux règles de la société, quelque mauvaises qu’elles soient. Aussitôt qu’il s’en affranchit, aussitôt qu’il veut être libre, il devient infailliblement la victime de ses idées.

C’était en vain que je me montrais publiquement au bras de Julian et que ses amis me traitaient avec déférence. Sa plume, que chacun redoutait, son courage, sa force à l’épée et au pistolet, me protégeaient des insultes. Mais c’était tout. On souriait d’un air significatif en m’apercevant ; les hommes m’accablaient de regards effrontés, et j’avais honte souvent, oh ! bien honte.

Les dames de l’aristocratie m’évitaient, ou, si elles étaient obligées de se rencontrer avec moi, elles m’adressaient un léger salut, comme à leur couturière ou à leur modiste. Au bal que donna la noblesse, je n’eus que des hommes autour de moi, et je n’avais dû mon invitation qu’à la peur. On craignait trop Julian pour l’offenser ; on nous invita donc, mais les femmes ne m’épargnèrent pas les regards insolents, et mes anciennes bonnes amies passèrent à côté de moi sans me saluer. La générale fut la seule qui me serra cordialement la main dans le péristyle.

Une aventure qui nous arriva au Théâtre-Polonais est aussi restée dans ma mémoire. Ma voiture at-