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Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/315

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LA FEMME SÉPARÉE

velours. Le visage était pâle, d’une blancheur de lait, encadré d’épaisses boucles de cheveux noirs, le nez fin, d’une pureté inouïe, les traits d’un modelé exquis. Elle ne portait pas de bijoux, pas même une fleur dans les cheveux. Cette femme n’a besoin d’aucune parure. Pour vêtement, une jaquette de velours rouge garnie d’hermine. Une guimpe de dentelle étend ses fils délicats sur cette gorge admirable. Elle a quelque chose de fier, d’imposant. Et surtout cette mélancolie, cette pâleur qui vous étonnent !

— Et son portrait à lui ?

— En ai-je besoin ? dit-elle avec un enthousiasme calme. N’ai-je pas dans ces feuilles jaunies le portrait du meilleur des hommes ?

Voyez ! lorsque le désespoir me saisit parfois et me torture, je prends ce manuscrit et je le lis, jusqu’à ce que je sois calme, et sereine, et forte.

Nous retournâmes dans son boudoir.

— Et vous n’avez plus jamais aimé depuis ? demandai-je.

— Qu’est-ce que l’amour ? s’écria Mme de Kossow. Je l’ignore. Mais ce que je sais, c’est que j’ai repoussé et blessé le plus noble cœur qu’il y ait.

Je t’aimais d’un amour sincère et profond.
Dieu veuille qu’un autre t’aime de cet amour !