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V

LE PURGATOIRE

« Disciplines, veilles, jeûnes, voilà mes armes contre l’enfer. »
EICHENDORFF.

On s’éveilla à midi, par un Beausoleil, Quand le maréchal du palais, suivi de nombreux domestiques armés de grands balais, eut expulsé les jeunes gens de la salle à manger, la paille fut balayée et la table rapidement mise. Peu à peu, toute la société en belle humeur se trouva réunie pour le déjeuner. Dragomira seule manquait. Elle ne se sentait pas à son aise, comme l’annonça Henryka, et désirait se reposer encore. Pour ne déranger personne, Henryka offrit de rester auprès de Dragomira, ce à quoi ses parents consentirent. Après le déjeuner, le cortège des traîneaux revint à Kiew dans l’ordre de la veille.

Henryka et Dragomira restèrent seules à Romchin, comme elles l’avaient prémédité.

Quand Henryka s’approcha du lit de Dragomira pour lui annoncer le départ des autres, Dragomira se mit à sourire.

« Ils se sont donc réellement laissé tromper, dit-elle.

— Ils n’ont été que trop bien trompés, répondit Henryka ; Soltyk en était pâle et m’a demandé secrètement si tu étais sérieusement souffrante. »

Dragomira s’assit dans son lit.

« Maintenant je veux me lever ; viens, esclave, sers-moi.

— Ne veux-tu pas d’abord déjeûner ?

— Si, je le veux, mais promptement. »

Elle donna à Henryka un léger coup avec la main.

« Mais toi, tu dois jeûner rigoureusement, entends-tu ? »