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VIII

DE L’AUTRE MONDE

Le monde des esprits n’est pas fermé.
Gœthe, Faust.

Le lendemain matin, le comte Soltyk reçut un billet de Dragomira :

« Je suis chez Monkony ce soir. Venez-y sans faute. Nous pourrons causer ensemble sans être dérangés. »

On préparait chez Monkony une représentation théâtrale. La répétition avait lieu ce soir-là. En dehors des acteurs il n’y avait que Dragomira ; Soltyk pouvait donc facilement s’approcher d’elle. Pendant qu’on jouait un proverbe de Musset, ils se retirèrent dans un coin peu éclairé de la salle où se trouvait un petit divan.

« Qu’avez-vous à me dire ? demanda le comte tout ému.

— Je suis prête à vous conduire dans le monde des esprits, dit Dragomira à voix basse, mais il faut quelque préparation de votre côté. Retirez-vous pour quelque temps du brillant tourbillon de ce monde où vous vivez et tournez votre âme de toutes vos forces vers le ciel.

— Comment ? Que faut-il faire ?

— Allez vous enfermer pendant trois jours dans n’importe quel couvent, et là, loin du monde, des hommes, du luxe et des plaisirs, appliquez-vous à de sérieuses méditations et à la prière ; jeûnez, faites pénitence, et le troisième jour confessez-vous et communiez.

— Quoi ! J’irai trouver un prêtre catholique ?

— Pourquoi non ? La forme n’est rien, le fond est tout. Il faut vous humilier devant Dieu. Il faut éveiller la douleur en