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LOUP ET LOUVE

lué par le grand chien roux avec des aboiements furieux.

— Eh Judas ! eh ! cria le pâtre, ici, Judas !

L’animal obéit à l’appel, mais il continua à grogner et à montrer les dents, se postant devant son maître qui, un bras autour de son amie, considérait le troubadour avec curiosité. Vidal, de son côté, contemplait avec plaisir le joli groupe, évoquant de façon vivante l’âge d’or des Grecs. Même un œil blasé n’eût pu découvrir une ombre de vulgarité ou de laideur en ces deux enfants.

Folquet portait crânement sur ses épaules une tête à boucles blondes, de Bacchus adolescent, que la bergère avait gracieusement ornée de feuilles de chêne ; ses pieds étaient chaussés de sandales brunes ; le reste de ses vêtements se réduisait à une peau de mouton en forme de vareuse sans manche, laissant bras et jambes à découvert. Il ressemblait, dans son allure, avec son long bâton à crosse, à un saint Jean-Baptiste dans le désert, tandis que son amie, qui portait une courte cotte d’un brun roux descendant aux chevilles, en guise de corsage une peau d’agneau blanc et, dans ses cheveux noirs flottants, des fleurs blanches et bleues, rappelait Théocrite.