Page:Sacher-Masoch - La Pantoufle de Sapho et autres contes, 1907.djvu/259

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
256
LOUP ET LOUVE

le Christ grossièrement sculpté dans la pierre, à l’orée du bois où elle l’avait prié de l’attendre. Lorsqu’enfin, le blanc palefroi arriva au galop sur la plaine verte et que Vidal vit le manteau, messager de bonheur, flotter au vent, son cœur battit comme celui d’un adolescent dont le premier Printemps d’amour accélère le pouls.

Loba le salua de loin, puis étant, avec, son aide, descendue de cheval, elle retira son gant et lui tendit sa main nue, qu’il baisa ardemment.

— Il y a longtemps que nous ne nous sommes vus, Peire Vidal, commença la châtelaine en s’asseyant d’un mouvement gracieux parmi les fleurs, pendant que le troubadour attachait les brides du cheval à une branche d’arbre.

— Toute une éternité, repartit Vidal. J’ai le sentiment d’avoir été mort, étendu durant de longues années dans un tombeau, et que votre regard me rappelle à la vie.

— Et qu’est-ce qui vous ramène ?

— L’amour, noble dame, répondit le troubadour. Vous devez vous souvenir que je quittai la maison de votre père, le cœur percé d’une flèche. J’errai à l’étranger dans l’espoir de vous oublier ; mais