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LA JUDITH DE BIALOPOL

Il congédia Judith avec hauteur et celle-ci sortit, emportant, sans y penser, le poignard.

Les choses se passèrent pour elle, ainsi que son prisonnier le lui avait prédit. Au bout de quelques jours, l’impérieux pacha était devenu son esclave. Plus elle se montrait fière, froide et vertueuse, plus l’Oriental se sentait enflammer de passion.

Accoutumé à acheter ses femmes, comme ses tapis persans et ses fourrures moscovites, au bazar de Stamboul, il s’irritait de cette résistance. Mais, quel que fût le désir qu’elle lui inspirât, il se raillait des conditions qu’elle prétendait lui imposer.

Un soir, le pacha était dans sa tente, accroupi aux pieds de la juive, lorsqu’on vint annoncer un transfuge amené par deux soldats.

Judith pâlit en le reconnaissant. C’était son mari qui, poussé par la jalousie, avait échappé à ses gardiens et quitté la ville, avec l’intention de tuer celui qu’il considérait comme le ravisseur de sa femme.

Le pacha allait le questionner, quand, brusquement, il se jeta sur lui. Le Turc, prompt comme l’éclair, s’esquiva et, d’un coup du revers de sa main, étendit à terre son agresseur et