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EAU DE JOUVENCE

tant le prix de beauté parmi les plus charmantes Viennoises. L’Italien Maffei s’exprima avec enthousiasme sur une Allemande à cheveux d’or ; l’Autrichien, comte de Stahremberg, chantait les louanges de deux yeux vénitiens ; le Tchèque Czernin défendait avec tout l’éclat de son éloquence nationale, les avantages de la comtesse Szapary, une ardente et svelte Hongroise ; seul, le compatriote de celle-ci, le jeune Emmerich Kemen, se taisait.

— Vous ne dites rien ? s’exclama Stahremberg en se tournant vers lui. N’auriez-vous pas trouvé dans toute la ville une femme digne de vos hommages ?

— Mon jugement ne saurait avoir de portée, répondit Emmerich qui, dans son étroit costume national, ressemblait plutôt à un bel adolescent qu’à un homme fait. J’ai eu, vous le savez, peu de rapports avec les femmes. Ma belle, jusqu’à ce jour, a été mon épée. Comment m’arrogerais-je le droit d’élever la voix, quand les lions de la capitale échangent leurs opinions ?

— Arrêtez, cria le Tchèque, il me vient à l’idée que notre discussion s’apaiserait bien vite, s’il nous était permis de compter parmi les nôtres la comtesse Elisabeth Nadasdy. Mais, hélas !