Page:Sacher-Masoch - Le legs de Caïn, 1874.djvu/177

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je suis ? Comment veux-tu que je sois ? M’aimes-tu encore ?

Mihaël lui caressa la joue, et se mit à regarder le paysage. Elle l’étreignit dans un élan de passion, et l’embrassa. Il se dégagea doucement. ― Demain, lui dit-il, tu es invitée chez le seigneur de Zavale pour la chasse à courre. Tu veux que je t’accompagne ?

Olga le regarda interdite. ― Ce n’est pas cela, dit-elle.

― C’est bien cela, répliqua Mihaël, qui sourit. Rentrons, il commence à fraîchir.

Ils revinrent ensemble au salon. Il la fit asseoir sur ses genoux, et l’embrassa comme autrefois ; elle était ravie, la joie l’étouffait. Tout à coup il lui dit d’allumer la lampe, il allait lire son journal. Sa femme serra son petit poing ; elle pleura toute la nuit jusqu’au matin.

Ses yeux n’étaient pas secs quand le lendemain il la mit en selle. Elle le regarda d’un air singulier, fouetta son cheval, et disparut sans l’attendre.

Le temps fut beau toute la journée. La chasse se répandit joyeuse par les champs. Les tireurs étaient distribués dans la forêt, Mihaël avait sa place assignée dans un épais taillis. La belle Olga conduisait la chasse, dévorant ses larmes. Ce fut elle qui découvrit le premier lièvre qui cherchait à sortir du fourré ; elle le désigna de sa petite main tremblante, les lévriers furent découplés, les cors retentirent, la cavalcade s’élança avec des cris sauvages. Se riant du danger, elle sauta les fossés et les haies,