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Page:Sacher-Masoch - Les Batteuses d’hommes, 1906.djvu/32

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ambiantes auront imprimé à l’un ou à l’autre de ses penchants.

Kasimira, l’héroïne de cette histoire, avait en germe tout ce qu’il fallait, pour faire soit une madone, soit une Astartée. Si, bientôt, les sombres puissances l’emportèrent sur les influences célestes, c’est peut-être uniquement, parce que sa famille donna à sa vie, dès le début, une direction pernicieuse.

À l’âge de seize ans, on la maria à un vieillard qu’elle ne put ni aimer ni estimer et qui ne sut lui inspirer que de la crainte. Elle était de haute naissance mais pauvre. Pour ne pas la laisser déchoir davantage de son rang, on jugea qu’il fallait, à tout prix, lui faire faire un riche mariage.

Les conséquences de ce faux calcul furent ce qu’elles sont presque toujours. Lorsque des parents, croyant bien faire, foulent aux pieds l’idéal, latent dans le cœur de leur enfant, ils font, le plus souvent, naître à sa place le dégoût, le haine, le vice ; bien heureux quand l’existence dévoyée n’aboutit pas au crime, au lieu du bonheur calme et de l’estime générale.

Kasimira n’était pas d’un caractère et d’un tempérament à se résigner et à souffrir en silence. Ce mariage austère et sans joies fit promptement, de cette jeune fille précoce et ardente,