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Page:Sacher-Masoch - Les Batteuses d’hommes, 1906.djvu/37

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L’arrivée de Stephan, lui promettant un passe-temps et un changement de vie, était donc pour elle un véritable événement. Elle alla l’attendre à la gare de la station la plus voisine, et le ramena au château, conduisant elle-même son attelage à quatre.

Jusque-là, Stephan n’avait eu de rapports avec la belle magnate qu’en présence de son mari et des étrangers qui se succédaient au palais ; maintenant, il lui allait falloir vivre presqu’en tête-à-tête avec cette femme oisive et passionnée, condamnée à la prudence et au mystère.

Kasimira n’avait rien à faire, et elle voulait s’amuser à tout prix. Elle se mit à flirter avec le jeune homme, sans aucunement penser plus loin. Mais il arriva ce à quoi elle n’avait peut-être pas songé. Timide, innocent, sans expérience de la vie, complètement nourri d’illusions, Stephan prit au sérieux ce qui n’était qu’un jeu pour la belle inoccupée, et, au bout de quelques jours, en tomba amoureux fou. Quand Kasimira se fut rendue compte de la profondeur et de la pureté de la passion qu’elle venait d’inspirer si imprudemment, elle s’abandonna sans résistance à tous ses instincts, et se mit à aimer à sa façon le pauvre étudiant, passant sur lui les caprices et les fantaisies les plus excentriques, parfois les plus cruelles,