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s’embarrassait de plus en plus dans les filets que, d’une main si experte, la coquette tendait sous ses pas ; il ne tarda pas à lui témoigner l’ardeur passionnée de sa nature d’artiste.

La baronne, jusque là, n’avait eu que des liaisons, mais n’avait jamais réellement aimé ; elle se plut à recevoir les témoignages de la passion de son adorateur et peu à peu ressentit pour lui un amour sincère et profond.

Malheureusement, une circonstance vint arracher soudainement la fière beauté à cet empyrée. Maximilien était jeune, beau et élégant ; il avait lui aussi de ces allures de génie auxquelles les femmes ne savent résister, mais, comme beaucoup d’autres artistes, il était travaillé par une nervosité morbide qui en faisait un être sans énergie et même assez lâche.

On était en été et la baronne habitait sa villa du duché de Bade ; un jour elle donna rendez-vous à Maximilien sur la montagne du Calvaire. Nos deux amants s’enfoncèrent dans la forêt voisine ; grisés par les baisers et les caresses… ils ne s’aperçurent pas que la nuit tombait et, quand ils songèrent à regagner la villa, ils se trouvèrent en pleines ténèbres. Ils perdirent leur route, errèrent en tous sens, s’égarant de plus en plus dans l’immense forêt. Les arbres ressemblaient à des géants pleins de vie ; des