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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

ne vient pas la chercher, bien ! elle s’abandonnera à qui lui plaît. Elle prodiguera ses tendresses à l’homme de son choix, mais comme une reine à son esclave ; tout en le rendant heureux elle lui fera sentir qu’elle se donne et se reprend selon sa fantaisie.

À vrai dire, Marie était loin d’entretenir réellement de semblables pensées ; elles s’agitaient pourtant dans sa tête et à son insu.

Nous ne pouvons jamais secouer complétement les impressions de notre enfance ; elles gouvernent notre vie comme une destinée, une bonne ou mauvaise étoile. La fille de la revendeuse avait sans cesse un diadème étincelant sur ses cheveux bruns ; aussi sortait-elle la tête haute ; même mendiante elle ne l’eût pas baissée.

Fière et sans crainte ni honte, elle conduisit Plant chez ses parents, parmi les robes de soie, les vases, les pendules, les hallebardes et les vieux divans.

— Voici mon amoureux ! dit-elle simplement.

M. Peneke, un gros homme à cou court qui marchait lourdement et pensait de même, se leva et tendit la main au clerc. Madame Peneke fut toute heureuse d’apprendre que Marie avait un amoureux, un brave et beau jeune homme, comme elle disait.