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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

À la nuit, il était assis sur un banc en pierre du parc. Son cœur battait avec force. À côté de lui, le jet d’eau lançait dans l’air sa colonnette d’eau argentée qui, en retombant, rafraîchissait son front brûlant de sa poussière humide. Le croissant de la lune brillant à travers les branches sombres des arbres dessinait sur l’allée blanche devant lui des ombres indécises qu’il cherchait à interpréter, avec autant d’anxiété et aussi inutilement qu’une femme au cœur faible.

Enfin, il vit s’avancer vers lui deux sveltes silhouettes. Il se leva et reconnut la baronne Julie, puis Hanna, dont un voile épais cachait la figure.

— Cher Andor, lui dit mademoiselle Teschenberg, nous n’avons que peu de moments à vous donner. Je suis en visite chez le baron Klebelsberg, et c’est grâce à Julie que j’ai pu m’esquiver. Venez donc que je vous parle, venez.

Elle prit le bras du jeune homme avec une précipitation qui le fit tressaillir, et se dirigea avec lui vers une allée obscure, silencieuse.

— Grand Dieu ! Hanna, qu’avez-vous donc ? interrogea-t-il.

— On veut nous séparer, Andor, nous séparer pour toujours, lui répondit-elle. Voilà pourquoi on nous a fait cesser nos leçons ; voilà pourquoi on nous empêche d’échanger quelques mots sans