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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

— Mais comment voulez-vous me mettre en évidence, répond Wolfgang. Il me manque les ailes pour voler vers le soleil ; la destinée me les a coupées ; je n’ai pas de bonheur.

— Mon Dieu ! je vous protégerai. Que voulez-vous de plus ?

La comtesse se fait maintenant naïve comme une fillette qui porte encore les pantalons bordés de dentelle.

Le sculpteur est ravi ; la tête lui tourne ; il oublie en ce moment qu’il est Allemand. Si la visiteuse lui disait : « M. Wolfgang, je me suis beaucoup intéressée aux Japonais ; ils sont mon idéal, » il laisserait couper sa chevelure allemande, sa barbe allemande ; il consentirait à porter entre les deux épaules une queue traînant jusqu’à terre.

— Oh ! vous êtes trop bonne, balbutie-t-il.

— Montrez-moi donc quelques-unes de vos œuvres commencées, supplie la comtesse.

Elle supplie réellement, et, quand elle supplie, elle sait être si séduisante !

La demande a électrisé Wolfgang. Il peut lui en servir des œuvres commencées ; il est justement l’homme des choses commencées. Que n’a-t-il pas projeté, modelé, ébauché ! Et maintenant le moment est venu où il peut étaler toutes ses richesses, tous ses trésors.